LE GUIDE DE L’ÉLÈVE
Boostez vos progrès à la batterie
5 astuces pour "travailler malin"
Nous l’avons vu dans l’article Un peu, beaucoup, pas du tout, le temps disponible pour travailler notre instrument préféré n’est pas toujours aussi conséquent qu’on le souhaiterait. Mais vous avez appris à la lecture de l'article qu'il est possible de trouver plus de temps qu’on ne le pense, avec une organisation optimisée de notre emploi du temps.
Si vous avez suivi scrupuleusement mes conseils, vous vous dites que vous ne pourrez pas faire plus pour gagner du temps…
...ERREUR !!! Il est encore possible de gagner du temps dans votre apprentissage. Non pas en ajoutant encore des minutes ou des heures pour vous exercer, mais tout simplement en progressant plus rapidement.
Ah là, je sens que vos oreilles se dressent (façon de parler…).
Comment progresser plus rapidement ? En travaillant utile !
Pour résumer :
Ne travaillez pas dur, travaillez bien.
Attention !
Quand je dis "progresser plus vite", je ne dis pas d’être pressé(e). Dans le domaine qui nous intéresse ici, la précipitation est contre-productive. Alors que la patience est une vertu précieuse pour bien progresser. Peut-être même qu'étudier la batterie vous apprendra la patience. Deux apprentissages pour le prix d'un !
Ce que je vais vous expliquer dans quelques secondes, c’est comment ne pas perdre du temps et éviter le travail non-productif. Comment optimiser votre temps de travail.
Si vous êtes en cours avec moi, ces quelques astuces ne vous seront pas complètement inconnues. Je les répète autant de fois que nécessaire. C'est-à-dire souvent... très souvent ! Mais c'est mon job et c'est normal car il faut bien reconnaître que certaines de ces astuces sont contre-intuitives, comme par exemple la première et la plus importante de toutes :
Astuce n°1
« Pour apprendre plus vite, il faut jouer lentement »
... Mais c’est tellement vrai ! Notre cerveau est ainsi fait : pour fixer précisément un geste, il a besoin de lenteur.
Ceux d’entre vous vous qui pratiquent un art martial savent peut-être de quoi je parle : le geste juste.
Pourquoi jouer lentement ? Je vois 3 raisons :
1- Souvenez-vous quand vous avez appris à écrire : traciez-vous vos lettres à toute vitesse ? Si oui, le résultat était-il satisfaisant ?…
2- La lenteur dans l’exécution d’un mouvement permet d’avoir une conscience fine du geste et par conséquent de le maîtriser en profondeur. Ainsi, vous jouerez en confiance.
3- Beaucoup de paramètres entrent en jeu dans un rythme de batterie : position, coordination des mouvements, régularité rythmique, équilibre sonore des différents éléments, souplesse du geste (qui créera la souplesse musicale faisant ‘’groover’’ le rythme). Pouvez-vous réellement appréhender tout ces paramètres en jouant vite ? Oui ? Alors je vous ai démasqué : vous êtes Superman !
Voici ce que dit Itzhak Perlman, au sujet de la lenteur dans l'apprentissage :
« Si vous travaillez une chose lentement,
vous l’oublierez lentement.
Si vous travaillez une chose rapidement,
vous l’oublierez rapidement »
En V.O : « If you practice something slowly, you forget it slowly. If you practice something fast, you forget it fast. »
Itzhak Perlman est un violoniste et professeur de musique israélien, considéré comme l'un des plus grands violonistes du XXe siècle et du XXIe siècle.
Astuce n°2
« N’ayez pas peur de faire des erreurs, ne vous jugez pas »
C’est normal de faire des erreurs, c’est même souhaitable. Si vous en faites, c’est le signe que vous travaillez utile.
Dans un apprentissage, l'erreur est une chose positive car c'est une opportunité de s'améliorer !
Dites-vous que le professeur se trompe, lui aussi. Moins souvent que vous peut-être - sinon changez de prof - mais il se trompe aussi.
A ce propos, lorsqu'on joue devant un public - en représentation, donc - on ne dit plus "faire une erreur", on dit "faire un pain" (langage familier).
Même les musiciens qui accompagnent Elton John font des pains. Vous voulez la preuve ? Appuyez sur le bouton "Oops"...
Les musiciens accompagnant James Brown avaient tout intérêt à faire le moins de "pains" possible : chaque erreur était sanctionnée par quelques dollars en moins sur leur paye ! Et James Brown leur donnait directement sur scène le montant de "l'amende" avec un geste discret à l'attention du musicien "fautif".
A propos, saviez vous que James Brown jouait avec deux batteurs sur scène ?
Un apprentissage, quel qu’il soit, consiste à corriger ses erreurs. On se trompe, on corrige (ça peut prendre du temps...) puis on ne se trompe plus : on a appris, on a progressé.
Concrètement :
Lorsque vous vous exercez sur un rythme, en boucle : n’arrêtez pas de jouer à la moindre erreur. Ce serait une perte de temps : si vous vous arrêtez à chaque erreur, imaginez le temps cumulé de chaque arrêt ! Continuez et vous ferez mieux au prochain tour…
En plus, cela vous habituera à rester concentré malgré les imprévus. Et des imprévus, il y en a toujours, dans un spectacle. Et c'est tant mieux, oserais-je dire. « La musique, il faut que ce soit vivant », comme le dit mon chef d'orchestre préféré. Il se reconnaîtra :-)
Si vous n'êtes toujours pas convaincu(e), imaginez ceci :
Vous avez pris l’habitude de tout arrêter dès que vous vous trompez. Arrive le jour où vous vous produisez en concert. Que se passera-t-il si vous faites la moindre erreur (ce qui arrivera car ça arrive à tout le monde) ? Tout le groupe devra arrêter le morceau en plein concert parce que vous arrêterez de jouer ???... Je ne préfère pas imaginer la tête d'Elton John, dans ce cas :D
Ne visez pas la perfection, visez l’amélioration.
Astuce n°3
« Soyez concentré »
Pour bien progresser, vous avez besoin d'avoir toute la concentration possible à votre disposition, quelque soit votre niveau. Pas 75%, pas 90%. 100% de concentration !!!
Pas évident, d'être concentré à 100% ?... Je vous l'accorde.
Alors prenons le problème par l'autre bout :
Qu'est-ce qui vous déconcentre ?
De cette manière, c'est déjà plus gérable. Il vous suffira donc de...
Faire la chasse aux "voleurs de concentration".
Faites vous-même la liste de tout ce qui parasite votre concentration dans votre environnement de travail.
Par exemple, un voleur de concentration à chasser absolument :
Les notifications, réseaux sociaux et autres. Le temps de votre séance, vous n’y êtes pour personne ! Débranchez-vous du monde extérieur pour quelques minutes. Passez en ‘mode avion’ si vous avez besoin de votre téléphone pour travailler (métronome, lecteur mp3...). C’est un moment privilégié avec vous-même. Vous allez vous recentrer et vous ressourcer.
Et après votre séance d'entrainement, si l'écran de votre téléphone ressemble à ça...
...ce n'est pas si grave ! ;-)
Autre source de déconcentration à éliminer facilement :
Avant de commencer une séance, réunissez près de vous tout ce dont vous aurez besoin pour travailler. Être obligé de s'interrompre pour faire autre chose que s'exercer peut être catastrophique pour la concentration.
Astuce n°4
« Jouez détendu »
Facile à dire, pas toujours facile à faire, je sais. Mais non négociable !!!
Épaules baissées (mais dos droit), bras relâchés, poignets souples, baguettes maintenues sans crispation. Je n'ai pas dit mou ! Tonique et souple. L'énergie que vous envoyez dans vos bras et vos jambes pourra alors circuler librement. Et tout vous semblera plus facile.
Au contraire, lorsque vous jouez crispé, vous ajoutez une difficulté à ce que vous travaillez, et pas des moindres ! Un peu comme si vous faisiez du vélo en gardant les freins serrés :-/
Jouer détendu, c’est bon pour :
- Vos plaquettes de frein
- Votre santé
- Votre endurance
- Le tempo
- Le groove
- Le son (vous n’aurez pas le même toucher si vous êtes jouez tendu)
- Le contrôle et la rapidité d’exécution
- Les sensations et le plaisir de jouer (qui n'est que le résultat des points énumérés ci-dessus)
et enfin...
- Provoquer l’admiration de votre entourage : qui est le plus sympa, cool et impressionnant à regarder : le batteur crispé ou le batteur détendu ?… et à entendre : un jeu hésitant et bancal ou un jeu fluide et maîtrisé ?
...alors, ça vaut le coup de s’en soucier chaque jour et chaque minute où vous jouez, ou pas ?
Astuce n°5
« Une difficulté à la fois »
Un exemple :
Vous avez décidé de perfectionner votre tempo car vous avez remarqué qu’au moment de placer un break, vous avez tendance à accélérer (le stress, l’excitation, une petite poussée d’adrénaline ?…). Pour travailler ce point précis, choisissez un groove et un break que vous maîtrisez déjà. De cette manière, vous pourrez diriger la plus grande part possible de votre attention sur le travail du tempo. Avec l'aide de votre métronome, bien entendu ;-)
Autre exemple :
Vous avez un groove à jouer. Il vous pose un sérieux problème parce que le rythme de la grosse caisse n'est pas évident à placer. De plus, le rythme de la cymbale est inhabituel pour vous et vous n'arrivez pas à le tenir quand vous jouez le reste avec.
Commencez par travailler la grosse-caisse et la caisse claire, sans jouer la cymbale. Une fois que vous maîtriserez le rythme de la grosse caisse, vous pourrez vous occuper de cette cymbale récalcitrante...
Donc : on règle un problème, puis un autre, puis un autre, etc.
Astuce n°6
« Planifiez »
Quoi de plus décourageant que de s’asseoir derrière la batterie sans savoir ce qu’on va jouer ? Sans avoir de projet pour la séance qui débute ?
Faites-vous un programme ! Prévoyez à l’avance de quoi sera composée votre séance d’entraînement.
Par exemple, si vous avez prévu de travailler 30 minutes :
- échauffement / gammes (frisés ou roulés ou contrôle du rebond…) : 10 minutes
- travail d’une série d’exercices (grooves ou breaks ou lecture ou coordinations…) : 10 minutes
- étude de style / étude du répertoire (jouer sur de la musique) : 10 minutes
Ne soyez pas trop rigide dans votre timing. Vous pouvez l’adapter selon vos besoins : si vous vous sentez en forme sur une partie du programme, vous pouvez rester dessus plus longtemps que prévu… ou pas. A vous de voir.
En fait, cela dépendra de votre caractère. Si vous préférez avoir un minuteur qui sonne la fin de l’exercice quoi qu’il arrive, faites-le. Rien n’est interdit, tant que ça vous aide !
Si vous êtes technophile, il existe des applis de planification et d’organisation de tâches. Faites-en un usage raisonné (ne passez pas la moitié de votre temps de travail à planifier, noter et faire des statistiques).
Astuce n°7
« Ne lisez pas un exercice en le jouant »
A la batterie, les exercices font souvent une ou deux mesures seulement, à jouer en boucle (si on schématise un peu, un groove de batterie est un rythme court, à jouer de manière répétitive). L’exercice se mémorise donc facilement. L’important est de comprendre l’exercice.
Donc :
1- Lire l’exercice,
2- le comprendre (ce qui aide à le mémoriser),
3- détourner le regard et jouer l’exercice.
Votre concentration sera alors à 100 % sur la réalisation du rythme. En plus, vous travaillerez votre mémoire, ce qui est très utile pour un(e) musicien(ne) !
Au contraire, si vous lisez en jouant, l’effort de concentration sera divisé entre la lecture et la réalisation du rythme. Moins de concentration disponible pour jouer = plus de chance de se tromper.
Si l’exercice est un travail de lecture de rythme ou de déchiffrage, et bien… voyons… comment faire ?… ne tenez pas compte de ce que je viens de vous dire !!!
Esprit de Frank Zappa, es-tu là ? Si vous ne voyez pas Frank dans cette partition, éloignez-vous de l'écran et là... Ooooohh !
(cliquez pour agrandir)
Astuce n°8
« Notez vos progrès »
Pourquoi faire ça ?
1- C'est bon pour le moral, c'est encourageant. Votre travail aura une existence concrète, vous pourrez le voir. Et si vous ne ressentez pas de progrès sensibles dans votre maîtrise de la batterie, vous pourrez toujours voir que "ça avance". Car c'est la vérité : vous avancez, un pas après l'autre.
Certes, les progrès ne sont jamais impressionnants sur une courte période. Et ça peut décourager les moins patients d'entre nous. En réalité, on avance petit pas par petit pas mais on avance et c'est ça qui compte.
2- Ça vous permet, au bout d'un certain temps, de faire le bilan du chemin parcouru (une fois par an, par exemple). Sans noter, on oublie où on en était il y a un an. Mais si vous notez ce que vous travaillez, vous pourrez prendre conscience des progrès qui cette fois-ci, avec suffisamment de recul, peuvent être impressionnants et inattendus. Excellent pour la confiance en soi et la motivation !
3- Ça vous évitera de travailler des choses que vous savez déjà jouer (gain de temps).
Concrètement :
Les tableaux de progression, au dos de certaines fiches d’exercices, sont là pour ça. Notez-y vos tempos.
Utilisez un carnet qui restera près de votre batterie. Notez-y les séries d'exercices que vous travaillez, les chansons que vous jouez, vos projets à court termes si vous en avez... Une fois le projet atteint, la chanson interprétée sans couac ou les exercices joués avec une main dans le dos, vous cochez ou vous barrez la ligne : "Mission accomplie !"
Ce qu’il faut retenir :